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Officiers et anciens élèves -
René PERINEAU
(1922 - 2005)
Source / Historique des
FNFL
Complément
CEPA St Raphaël en 1948. CEV, EPNER en 1951
Entre chez Breguet aux
Essais en Vol en 1956 et est nommé Directeur des Essais en Vol en
1957 Il dirigera et participera aux vols sur Br 1050 “Alizé”, Br
941, Br 1150 “Atlantic”
Il quitte Breguet en
1967. Pilote de ligne Air Algérie puis EAS. Commandant de Bord 727.
Part en retraite en
1986 18 000h de vol
Décédé en avril 2005
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Eloge funèbre de
RENÉ PÉRINEAU
28 janvier 1922 - 20 avril 2005
prononcé par l'IGGM René BLOCH
lors de la messe du souvenir en l'église Saint-Lambert de Vaugirard
à Paris le 11mai 2005
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Intelligence, volonté, courage, patriotisme, telles sont les
qualités qui viennent à l'esprit en évoquant, dès sa jeunesse, la
personnalité de notre ami René
Intelligence : une mention Très Bien avec les félicitations du jury
de son baccalauréat et surtout son admission à dix-neuf ans à
l'Ecole Polytechnique. Volonté, lorsqu'en juin 1940 il longe à
bicyclette la côte atlantique du Croisic jusqu'à Saint Jean de Luz,
cherchant dans chaque port un bateau pour s'embarquer vers
l'Angleterre, projet qu'il mettra à exécution trente mois plus tard.
Courage lorsque les Allemands, ayant découvert le courrier à lui
confié et caché par lui pour franchir la ligne de démarcation,
l'arrêtent après qu'il se soit dénoncé pour épargner les autres
voyageurs. Patriotisme enfin et surtout, qui le conduira de
Polytechnique en Espagne puis en Angleterre, le fera s'engager dans
les Forces Navales Françaises Libres, participer aux convois de
Atlantique et devenir pilote de chasse.
Qu'il me soit permis de m'étendre quelque peu sur cette période de
la guerre qui a tellement marqué sa vie. Le 17 décembre 1942 se
déroule à Lyon, où Polytechnique est repliée, le spectacle de la
revue Barbe permettant une fois l'an aux élèves de railler leurs
professeurs et leur administration. La zone dite libre vient d'être
occupée et un camarade, présent parmi nous ce soir, vient de
répondre à l'obligation d'apposer dans sa salle d'étude le portrait
officiel du Maréchal en y affichant - ô dérision - une photographie
de la poignée de main de Montoire entre Pétain et Hitler. Autant
dire que la revue Barbe sera haute en couleurs et notre ami Périneau
y prend la part auquel le destine déjà son humour corrosif. Parmi la
douzaine de Polytechniciens qui seront la gloire de cette promotion
1941, la décision de s'engager est mûre : en témoignent pour les
générations à venir, leurs noms - dont celui de René - gravés sur la
plaque commémorative de Lyon-Villeurbanne.
Son camarade et futur beau-frère Jacques Mantoux, qui s'est vu
indiquer par un professeur de droit, réfugié espagnol, une filière
d'évasion, part quatre jours plus tard. René part sur ses traces le
6 janvier 1943 avec trois camarades et, après avoir franchi la
frontière, ils couvrent à pied la route des Pyrénées à Barcelone,
marchant la nuit et dormant le jour pour éviter l'interception. De
Barcelone où ils sont rejoints par six autres X, ils parviennent à
repartir vers Madrid et, via le Portugal, vers le Maroc d'où la
plupart iront compléter leur formation militaire à Cherchell avant
d'aller combattre, René par contre et deux de ses camarades
s'embarquent fin mai 1943 via Gibraltar pour Londres où, alors que
les deux autres rejoignent les forces terrestres, René s'engage dans
les Forces Navales Françaises Libres et est rattaché à la dernière
promotion de l'Ecole Navale de Portsmouth dont, devançant ses
condisciples anglais, il sort major en décembre 1943.
Il participe alors, à bord du patrouilleur "Président Houduce", à
des opérations de convoyage en Atlantique puis, volontaire pour
l'Aéronautique Navale, est envoyé en août 1944 à Memphis puis à
Corpus Christi aux Etats-Unis où, un an plus tard, il obtient son
brevet de pilote de chasse. Rappelé à la fin des hostilités à
Polytechnique pour y passer ses examens de sortie, il choisit le
corps du Génie Maritime, branche aéronautique et, après une année
écourtée à l'Ecole de la rue Octave Gréard, poursuit jusqu'en 1948
ses études à l' Ecole Nationale Supérieure de l'Aéronautique.
Sa première affectation du temps de paix sera, de 1948 à 1950, le
Centre d'Expérimentation de l'Aéronautique Navale de Saint-Raphaël
où nous nous rencontrons pour la première fois, amorçant un lien qui
durera quelque vingt ans au plan professionnel et plus d'un
demi-siècle au plan de l'amitié. Puis en 1951, René est affecté au
Centre d'Essais en Vol où il est chargé de la mise au point des
avions, des hélicoptères et des équipements destinés à la Marine,
tels l'Aquilon et l'Alouette. Il participe à ce titre à de
nombreuses missions à l'étranger, en particulier aux essais
d'adaptation sur porte-avions au Royal Aircraft Establishment de
Farnborough où sa compétence technique, son caractère dynamique et
sa personnalité haute en couleur ont profondément marqué les
autorités britanniques .
Après cinq années fort bien remplies, René quitte le service de
l'Etat en octobre 1956 avec le grade d'ingénieur en chef du Génie
Maritime pour devenir ingénieur navigant, puis très vite Directeur
des Essais en Vol des Avions Louis Breguet . Donnant la pleine
mesure de ses capacités, il assure la mise au point de l' Alizé, du
Taon, du Br.941 et surtout de l' Atlantic. Participant à toutes les
réunions de ce programme-clé, il les marque non seulement de sa
compétence, mais de son humour qui détend bien souvent des ambiances
internationales délicates. Et que dire de certains moments plus
difficiles lors desquels son endurance, sa compassion et sa
gentillesse resteront inoubliables , telles ces journées d'avril
1962 où, après l'accident en vol du second prototype de l'Atlantic,
il passe une nuit entière dans les débris de l'appareil pour trouver
l'explication de la catastrophe, avant d'accompagner le lendemain le
fils du pilote disparu Bruneau dans le poste de pilotage du premier
prototype, pour que ce fils puisse revivre par la pensée les
derniers instants de son père.
Mettant un terme à sa carrière d'ingénieur, René entre en mai 1967
comme pilote de ligne, puis très vite comme commandant de bord, à
Air Algérie Il y restera dix ans, y rendant les plus précieux
services grâce à son expertise technique, puis sera durant huit
autres années pilote de la compagnie EAS, avant de prendre, le 1er
octobre 1985, avec dix-huit mille heures de vol à son actif, une
retraite bien méritée pourtant entrecoupée l'année suivante de six
mois supplémentaires de pilotage pour EAS.
Les vingt dernières années de sa vie terrestre seront consacrées à
sa famille et à sa passion pour le clavecin et le chant choral, en
particulier avec le Choeur franco-allemand dont il participera à
tous les concerts jusqu'en 2004. C'est ainsi que, nullement rebuté
par la tâche, il construit son propre clavecin qu'il baptise Renatus
Perinaltus et que, lorsque la baisse de sa vue ne lui permet plus de
lire les partitions, il apprend par cœur les œuvres entières, ayant
désormais comme seul repère, lors des concerts, les gestes du chef
de choeur.
Au risque de porter atteinte à sa légendaire modestie, je me dois
d'ajouter que ses mérites précédemment évoqués ont conduit la
République à lui conférer, dans tous les domaines où se sont
exercées ses activités , les plus prestigieuses décorations. René
Périneau est Chevalier de la Légion d'Honneur, décoré de la Croix de
Guerre 1939-1945, médaillé de la Résistance, de la France Libre et
de l'Aéronautique, porteur des insignes de Combattant Volontaire de
la Résistance et de Combattant Volontaire de la Guerre.
Mais mon évocation de cette existence d'un merveilleux ami, si riche
en succès et en exemples, ne serait pas complète si je ne
mentionnais ses plus belles réussites, ses enfants, ses
petits-enfants et l'arrière-petit-fils qu'il eut la joie de
connaître. Les membres de cette cohorte, presque tous ici ce soir,
sont les plus belles décorations de son existence, plus précieuses
encore à ses yeux que celles que lui a conférées la France. Que les
joies que vous lui avez données soient pour vous le plus précieux
des viatiques.
Et sachez que ceux que nous aimons ne meurent jamais : ils
continuent à vivre dans nos cœurs et dans nos pensées.
Source : perso.orange.fr/amis.breguet
Source Web
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