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Officiers et anciens élèves -
Léon Hippolyte MORON
(1892 - 1974)
Dossier complet / PDF
rédigé par Jean Cordelle (sources : Archives du SHD, de Jean
Cordelle et du
Dr. Carcenac)
"Lettre de Léon Moron au Général de Gaulle" / PDF (sources : Archives du SHD)
"Une annotation sur un livre, à bord du sous-marin Ampère en 1917" /
PDF par
Michel Carcenac
Naufrages à quai : une lettre de marin par Michel Carcenac /
Lien PDF
Le Rigault de Genouilly en Mer de Chine par Michel Carcenac /
Lien
PDF
La Croisière du Rigault de Genouilly dans le Pacifique 1936/1937 :
Première partie : de Saïgon à Melbourne par Michel Carcenac
Deuxième partie,
de Nouméa à Auckland en passant par les Nouvelles-Hébrides par
Michel Carcenac
De la
Nouvelle-Calédonie à la Nouvelle-Zélande, troisième partie de la
croisière du Rigault de Genouilly dans le Pacifique en 1937 par
Michel Carcenac / Complément PDF
L'escale aux Tongas en
1937, quatrième partie de la croisière du Rigault de Genouilly dans
le Pacifique par Michel Carcenac /
Complément PDF
Des Tongas aux Samoas
en passant par Futuna, la croisière du Rigault de Genouilly dans le
Pacifique en mai 1937 par Michel Carcenac /
Complément PDF
Escale à Tahiti,
sixième partie de la croisière du Rigault de Genouilly dans le
Pacifique par Michel Carcenac /
Complément PDF
Vers les îles
australes, septième partie de la croisière du Rigault de Genouilly
dans le Pacifique par Michel Carcenac /
Complément PDF
Le Juillet à Tahiti,
huitième partie de la croisière du Rigault de Genouilly dans le
Pacifique par Michel Carcenac /
Complément PDF
Vers les îles sous le
vent, le royaume de la reine Pomare par Michel Carcenac /
Complément PDF
Des Touamotous aux
Marquises par Michel Carcenac /
Lien web
Le centenaire des
missions maristes à Wallis et Futuna par Michel Carcenac /
Lien web
L’affaire du
SINAÏA / PDF rédigée par
Michel Carcenac
Histoire racontée par le
commandant Moron /
PDF Tiré du livre de
Michel Carcenac
"Les
Braconniers d’Eau Douce"
Né le 27 novembre 1892 à BREST (Finistère) - Décédé le 2 septembre 1974 à SIORAC
en PERIGORD (Dordogne)
Entre dans la Marine en 1910
30 septembre 1910 Ecole
Navale (comme Jean Le Mée)
Extrait PDF complet sur
LV Le Mée /
Téléchargement PDF / Remerciements Jean Cordelle
Archive familiale / René
DUCOM, Lieutenant de Vaisseau (1892-1989)
05 octobre 1912 Ecole
d’application des Aspirants sur la JEANNE D’ARC
05 octobre 1913
Enseigne de vaisseau de 2ème classe : port BREST.
01 janvier 1914
Croiseur cuirassé "MARSEILLAISE", 2ème escadre légère (Cdt Louis
Exelmans)
Mars 1914 à Juillet
1916 Croiseur LAVOISIER : Islande, puis Manche Occidentale
Juillet 1916 à Mars
1917 Second sur le S/M AMPERE Mer Adriatique - Brindisi
05 octobre 1915
Enseigne de vaisseau de 1ère classe
16 août 1916 : Epouse
Geneviève Blanc, sa Marraine de Guerre
Mars 1917 à Décembre
1918 Second sur le S/M AMPERE - Maroc
Décembre 1918 à Avril
1919 Second sur le S/M SANE - Toulon
Avril 1919 à Février
1920 : Elève Officier Torpilleur - Brest
14 avril/1919 :
Lieutenant de Vaisseau
Octobre 1920 à Oct.1922
Brevet Supérieur Electricien Cuirassé PATRIE
12 mai 1922 : Parrain
de Nicole Le Mée, fille de Jean Le Mée et de Colette Repelin
Voir Biographie Jean Le
Mée / Lien web
Novembre 1922 à Oct.
1924Chef du Service Electricité – Membre de la Commission d’études
Pratique du tir des Torpilles
30 janvier 1923 :
Chevalier de la Légion d'Honneur.
Octobre 1924 à Oct.
1925 Elève Ecole de Guerre Navale Officier breveté de l'École
Supérieure de la Marine
Extrait Ouest-France / 17 avril 1925
Octobre 1925 à Janvier
1926 Elève Ecole de Guerre Navale
Janvier 1926 à Déc.
1927 Mission Navale en Pologne - Varsovie
22 septembre 1927
Capitaine de corvette
Extrait Ouest-France / 20 novembre 1927
Extrait Ouest-France / 5 janvier 1928
Février 1928 à Février
1930 Commandant Aviso Baccarat - Division Navale de Levant (Mer
Egée, Etats du Levant, Egypte, Mer Rouge)
Mars 1930 à Juin 1932
Adjoint au Cdt Ecole Navale
14 mai 1932 Capitaine
de Frégate
Extrait Ouest-France / 14 mai 1932
Juillet 1932 à Juin
1934 Chef d’EM Division Navale du Levant
30 janvier 1933
Officier de la Légion d’Honneur - Officier de l’Instruction Publique
Légion d'honneur
Extrait Ouest-France / 31 décembre 1933
Sept. 1934 à Août 1935
S/Chef d’EM 3ème Région Maritime
Octobre 1935 à Oct.1937
Cdt Aviso Colonial RIGAULT DE GENOUILLY - Commandant des Forces
Navales d’Extrême Orient, puis Station du Pacifique (Chine,
Indo-Chine, Indes néerlandaises, Nouvelle Guinée, Nouvelle
Calédonie, Nouvelles Hébrides, Tonga, Wallis, Samoa, Fidji, Iles de
la Société, Archipel Austral Rapa
Extrait Ouest-France / 20 décembre 1936
1er mai 1938 Conseiller
aux Affaires Maritimes auprès du Gouvernement Libanais (E.M.G 2ème
Bureau (unité Marine de Beyrouth)
3 septembre 1939
Président de la Commission des Transports Maritimes et des ports au
Levant
9 Juillet 1941 Placé
hors cadres, au service de la Marine Marchande, pour continuer à
exercer ses fonctions au Levant (Moron est le seul Officier à rester
à Beyrouth. Il soustrait au pillage (et aux anglais) tous les
matériels abandonnés par la Marine de Vichy
17 Juillet 1941 Relevé
de ses fonctions par le Général Catroux, Délégué Général de la
France Libre au Levant nommé par de Gaulle
30 juillet 1941 Remis
en fonction par Catroux
15 septembre 1941 Mise
à la retraite d’office par e Gouvernement de Vichy
Octobre / Novembre 1941
Quitte les fonctions de conseiller aux Affaires Maritimes et mis à
disposition du Délégué Général (Catroux) - Dénonciation calomnieuse
et pression anglaise auprès de l’Amiral Muselier pour le renvoi /
exil de Moron - De Gaulle exige que cessent les « ingérences
déplaisantes et inconvenantes » anglaises exercées contre Moron par
le Général Spears et le War Office Catroux apporte son soutien à
Moron,
Juin 1942 Moron nommé
Séquestre Général Adjoint par le Général Catroux
Juillet 1942 Moron
nommé Directeur du Séquestre à Beyrouth par le Général Catroux
4 avril 1944 Soutien de
Jacquinot et de Catroux au dossier de nomination de Moron au grade
de Capitaine de Vaisseau
21 septembre 1942
Lettre de Moron au Général de Gaulle et au Général d’Armée Paul
Beynet Délégué Général et Plénipotentiaire de France au Levant -
Soutien du Général Beynet
11 décembre 1944
Annulation du décret de Vichy plaçant le CF Moron à la retraite au
15 septembre 1941
26 novembre 1944 Moron
promu Capitaine de Vaisseau (mais reste à Beyrouth toujours comme
Directeur du Séquestre)
15 juin 1946 Léon Moron
est mis à la retraite. Il se retirera à Siorac en Périgord
Voir biographie Christian Le Mintier de la Motte Basse /
Lien web
Voir Biographie Jean Le
Mée / Lien web
Complément par le Dr
Michel Carcenac
MES AMIS LES MORON AU
LIBAN
Voici déjà plusieurs articles que je consacre à mes amis le
Commandant Léon Moron et son épouse Geneviève Moron.
https://www.histoire-genealogie.com/Une-annotation-sur-un-livre-a-bord-du-sous-marin-Ampere-en-1917
https://www.histoire-genealogie.com/L-affaire-du-Sinaia-1939-1942
Les récits qu’ils m’ont faits de leurs vies et de leurs voyages
remplissaient d’exotisme et d’aventures « le Souleillal », leur
chartreuse dans une colline au-dessus de la vallée de la Dordogne.
Dans ces récits
apparaissaient des personnages fascinants. La position importante
occupée par le Commandant, la passion de Geneviève pour les arts et
l’archéologie, les mettaient à même de rencontrer les gens de valeur
des pays qu’ils habitaient.
En 1928, les Moron
étaient installés au Liban.
Voici Les affectations
au Liban et à Damas du Commandant Moron :
- 16.06.1932/13.07.1934
: Chef d’État-major de la Division Navale au Liban,
Directeur administratif
des Œuvres Françaises au Liban, Délégation de la France à Beyrouth.
- Mai 1938 : Président
de la Commission des Transports maritimes et des Ports au Levant.
Délégué adjoint au général à Damas.
- Jusqu’au 31.08.1941 :
Conseiller aux Affaires Maritimes au Liban.
- Du 31.08.1941 au
31.12.1946 Directeur du Séquestre Général des États du Levant à la
Délégation Générale de la France au Liban.
Pendant que son mari
était en mer, Geneviève découvrait les richesses archéologiques du
Moyen Orient. Les officiers du Renseignement gardaient un œil sur
elle, qui se risquait dans des endroits désertiques et dangereux.
Geneviève Moron se moquait des avertissements, se déplaçait en
voiture, avec seulement le chauffeur.
A Beyrouth, les Moron,
dans leur agréable maison entourée de fleurs au flanc d’une colline,
recevaient beaucoup, les revenus de Geneviève le permettaient.
Geneviève y rencontra
André Gide. Après les discussions littéraires et philosophiques de
la journée, les soirées étaient consacrées aux parties d'échec entre
Geneviève et Gide.
HERMINE DE SAUSSURE ET
HENRI SEYRIG
Geneviève avait
retrouvé à Beyrouth le couple Seyrig, de grands amis. Henri Seyrig
occupait le poste de Directeur Général des Antiquités de Syrie et du
Liban. Il créa et dirigea jusqu’en 1967 l’Institut français
d’Archéologie du Proche Orient. Ses grands chantiers furent les
fouilles de Baalbek, de Palmyre, et du Krak des Chevaliers. A
Palmyre il fit dégager le temple de Bêl, un des plus beaux temples
du Moyen Orient, celui que l'Organisation islamiste a pulvérisé.
Geneviève, qui avait
suivi les cours de l'École du Louvre, complétaient ses connaissances
auprès d’Henri. Celui-ci était aussi un numismate de réputation
internationale, il avait une importante collection de monnaies
hellénistiques et romaines. A sa mort il légua une partie de sa
collection au musée de Beyrouth et l'autre partie au cabinet des
médailles à Paris.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/syria_0039-7946_1973_num_50_3_6401
Hermine de Saussure,
(Miette Seyrig) habitait Neuchâtel. Avec son amie Ella Maillart,
elle pratiquait le ski l'hiver et la voile l'été. En 1926 Miette
entreprit, avec une étudiante en Lettres comme elle, une croisière
en Mer Égée, histoire de retrouver la Grèce antique. Elle découvrit
le meltem, le vent du Nord qui souffle tout l'été dans les Cyclades.
Son livre, "La Croisière de Perlette" eut un grand succès.
Les Seyrig ont toujours
eu des relations suivies avec les Moron. Leur fille Delphine,
l'actrice de théâtre et de cinéma, s'y est rendue plusieurs fois,
Geneviève l'aimait bien.
La SDN, Société Des
Nations, avait confié à la France le Mandat de la Syrie et du Liban.
Ces territoires avaient été annexés par l'Empire Ottoman, allié des
Allemands. Après la guerre de 14-18 et la défaite de la Turquie, la
France avait reçu pour mission d'aider ces pays à se doter d'une
administration, d'un gouvernement et d'institutions démocratiques,
puis de les amener à l'indépendance. (Au nom de la France Libre, le
Général Catroux la leur accorda en 1941.)
Les Anglais, ayant
reniflé des odeurs de pétrole en Irak, s'étaient débrouillés pour en
obtenir le Mandat. Ils regrettaient de ne pas avoir reçu le Nord de
la Syrie. Les officiers de l'Intelligence Service s'amusaient
follement à fomenter des révoltes un peu partout, à distribuer des
armes aux tribus, à mettre le désordre chez leurs alliés, les
Français.
MARGA D'ANDURAIN
C'est à Palmyre que
Geneviève Moron rencontre Marga d'Andurain, une belle et séduisante
femme de quarante ans, mariée à quinze ans avec Pierre d'Andurain de
Mauléon, représentant d'une vieille noblesse basco-béarnaise. Marga,
Marguerite Clérisse, était née à Bayonne, troisième enfant de
Maxime, un magistrat. Sa mère était présidente des femmes
royalistes.
A l'âge de huit ans,
Marga a le diable au corps, à tel point que l'évêque de Bayonne
vient l'exorciser, à son domicile. Pour la mater, on l'enferme chez
les Ursulines, puis dans deux autres établissements religieux.
Chaque fois elle s'évade à sa manière, en se faisant renvoyer. Au
Sacré Cœur de Bordeaux au motif "d'avoir fomenté la révolte dans le
dortoir. Passons sur quelques années de France pour voir Marga
arriver au Caire, avec le mari et les deux fils, et monter un
institut de beauté. Gros succès mais elle se lasse et se retrouve
seule à Damas en 1929. Elle y fait la connaissance d'un Anglais, le
major Jeffrey Sinclair, le plus connu des agents de l'Intelligence
Service. Une liaison au grand dam des Français et des agents du 2e
bureau. C'est le grand amour, Jeffrey lui fait visiter Damas, ses
ruelles et ses richesses, puis l'oasis de Palmyre. Marga est
éblouie. Elle annonce à Jeffrey qu'elle part au Caire chercher son
mari et ses fils qu'elle ne peut abandonner, et elle lui jure
qu'elle reviendra bien vite à Damas. Après son départ, l'espion
britannique aux nerfs à toute épreuve se tire une balle dans la
bouche.
A son retour en Syrie,
Marga fréquente les Seyrig et Geneviève Moron. Elle prend la gérance
du caravansérail de Palmyre et le baptise "Hôtel de la Reine
Zénobie". Elle en fait une demeure élégante, moitié hôtel, moitié
maison d'hôte. Les bédouins de la palmeraie fournissent le
personnel. Les touristes ne veulent pas manquer l'Hôtel de la Reine
Zénobie, les archéologues non plus. La bonne société de Damas
apprécie les séjours chez Marga, une femme qui sait recevoir et
raconter.
Geneviève Moron m’a souvent parlé de Palmyre où l'on ne s'ennuyait
pas avec Marga. Le commandant Moron n’était pas du même avis :
« Le deuxième Bureau
m’avait prévenu que Marga était une espionne de l'Angleterre,
maîtresse d'un agent de l'Intelligence Service, et que Geneviève
devait cesser de la fréquenter. Ce n'était pas raisonnable pour
l'épouse d'un officier supérieur, Chef d'État-Major de la Division
Navale du Levant, Conseiller Maritime du gouvernement du Liban,
chargé de fonctions civiles très importantes. »
Mais Geneviève se
trouvait si bien à l’Hôtel de la Reine Zénobie…
Puis, Marga décida
d'aller à la Mecque. Première européenne à faire le pèlerinage, elle
deviendrait célèbre. Pour cela le 23 mars 1933, elle épouse Soliman
Abdel Aziz, un Arabe de la palmeraie. Elle prend des cours d'arabe
en n'oubliant pas les jurons, les injures, "ça peut servir." Un iman
lui fait réciter quelques versets du Coran et lui délivre un
certificat de bonne musulmane. Mais ce serait mieux de partir à deux
femmes et elle propose à Geneviève de l'accompagner. Elle lui
trouvera un mari prêt à faire le pèlerinage de la Mecque, avec un
peu d'argent le mariage est facile. Ensuite le quatuor irait en
Égypte prendre le bateau pour Djeddah, c'est simple, non ?
Geneviève, fort amusée
de la proposition, refuse gentiment.
Le couple embarque à
Port-Saïd sur le Dandolo, paquebot italien, avec la masse des
pèlerins. En route pour la Mecque, la Kaaba et le retour glorieux.
Privé de son active
patronne, l'Hôtel de la Reine Zénobie redevient un caravansérail et
Geneviève se hâte de retourner à Beyrouth.
En avril 1933, le
Dandolo avec Marga à bord mouille en rade de Djeddah. Malgré son
déguisement, Marga a été reconnue par les femmes. Le médecin
saoudien qui monte à bord effectuer le contrôle sanitaire des
passagers est prévenu. Il avertit le gouverneur de Djeddah et
celui-ci accepte de prendre la Française dans son harem, un lieu
convenable et protégé, en attendant le retour de la Mecque du mari.
Le médecin et le consul
de France prévoyaient des difficultés, mais pas l'avalanche de
problèmes que cette femme allait leur poser.
Tous deux pensaient que
cette agitée allait se calmer cloîtrée dans son harem, faire comme
les autres : dormir, se laver, s'habiller et se recoucher. Ce fut le
contraire.
Aux femmes fascinées,
elle apprenait des pas de fandango, de valse, de charleston. Soir
après soir, très agitées, elles tapaient en rythme sur de vieux
bidons et dansaient en faisant un vacarme effroyable. Le matin,
Marga leur enseignait des jeux d'enfants : colin-maillard, le furet,
des rondes. Elle leur faisait faire des exercices d'assouplissement,
de la gymnastique suédoise, organisait des concours de corde à
sauter, Enfin, un jour elle entraîna tout le harem ¬— femmes,
enfants, esclaves — dans une farandole si déchaînée sur la terrasse
du palais que les soldats de la caserne proche furent obligés
d'intervenir.
Toutes les femmes de Djeddah, de terrasse en terrasse… ne parlaient
que de la « Francaoui. »
Dans le harem les
intrigues fleurissaient. Marga ne tarda pas à semer la zizanie.
Mais le pire était à
venir. Soliman revient de La Mecque et veut coucher avec sa femme.
Marga refuse malgré la pression des femmes.
Les jours suivants,
elle sort du harem, boit de l’alcool, nage dans la Mer Rouge, est
invitée par tous les consuls.
C'est le scandale à
Djeddah.
Et voici qu’arrive le
fils du consul. L'irruption de Marga dans la vie calme du consulat
l'a enchanté. Il en est très amoureux, organise des sorties. Un beau
jour il a le culot d'entrer dans le harem chercher Marga.
C'en est trop, elle est
expulsée par le gouverneur qui lui fait une scène devant tout le
harem : Tu souilles ma maison avec ce chien de mécréant qui
empuantit mes narines, tu n'es pas digne de rester ici, je te chasse
etc…
Marga va loger à
l'hôtel, son amoureux l'accompagne dans la ville en portant sa
valise ! Puis, il reste avec elle.
C'est précisément ce
soir-là que meurt Soliman, le mari. Le matin il avait eu une
entrevue orageuse avec Marga. Dans la soirée, pris de douleurs
violentes, il affirme à ses proches que sa femme l'a empoisonné.
Les cousins réclament
justice contre l'empoisonneuse. Le directeur de la police, suivi par
la famille, les gardes et les curieux, fait défoncer la porte de la
chambre. Tout le monde voit Marga au lit avec le jeune homme, et il
faut l'autorité des policiers pour qu'ils ne soient pas lynchés.
Elle est jetée en prison au milieu des rats, des punaises et de
toutes sortes d’insectes affamés.
Marga, risque d'être
lapidée à mort pour adultère et assassinat. Tout Djeddah brûle d'y
participer.
Au bout de huit jours,
le consul obtient l'autorisation d'aller la voir dans son
cul-de-basse-fosse et il en revient atterré. Amaigrie, brûlante de
fièvre, boursouflée par les morsures de toutes les punaises, les
bras et les jambes recouverts de croûtes de sang coagulé, la peau se
détachant par lambeaux comme celle des lépreux, folle de peur, de
misère, d'angoisse. Elle s'était accrochée à lui, le pressant de
questions, elle avait très peur d'être torturée.
Le consul lui envoie
tout d'abord un bidon de désinfectant ménager. Malgré la chaleur
terrifiante qui incommode même les Saoudiens, Marga récure sa
cellule et l'aménage; elle reçoit un lit, une chaise, une table. Du
consulat, on lui porte tous les jours ses repas.
Le consul se démène
pour la tirer de ce mauvais pas. Il avait su gagner l'estime du roi
et de personnages importants. Le ministre des affaires étrangères ne
désirait qu'une chose, l'expulsion rapide de Marga et éviter les
problèmes avec la France. Mais le scandale avait été si grand, si
public, les lois du royaume si souvertement bafouées par un meurtre
probable et un adultère avéré, que Marga méritait la lapidation.
Cependant, lapider une Française la première année du nouveau
royaume … Les journaux de Beyrouth, la presse internationale se
déchaînaient.
Après un procès pour la
forme, Marga est conduite sur un bateau anglais, et en route pour
Port Saïd.
Le cycle des aventures
de Marga d'Andurain n'est pas terminé, mais elle quitte pour
toujours, le Levant, Beyrouth, Damas, Palmyre et Geneviève Moron.
Je me suis grandement
appuyé pour vous conter cette histoire sur le livre "La Comtesse de
Palmyre" de Marie-Cécile de Taillac, chez Belfond.
Le commandant Moron
était en rade de Djeddah le 1 Février 1933, deux mois avant
l’arrivée de Marga. Il fit des croquis de la ville depuis son bateau
au mouillage.
Les Moron à Beyrouth
Dans son rapport au Contre-amiral Chef d’État-Major Général de la
Marine, le capitaine de vaisseau FATOU écrit :
« Le commandant Moron occupe actuellement une situation
considérable, les biens dont il a la gérance comprenant, outre les
allemands et les italiens, tous ceux appartenant à des Français
actuellement en France parmi lesquels il faut ranger des entreprises
telles que la filiale de l’Irak Petroleum de Tripoli.
Ainsi, Moron a occupé
des postes très importants au Liban et en Syrie de 1932 au 13
juillet 1934, Puis du 1er avril 1938 au 15 juin 1946. Il est le
premier officier de marine de Haut grade en activité à avoir rejoint
le général de Gaulle."
Bien sûr, cette
situation entraînait beaucoup de jalousie, surtout de la part des
officiers de la Marine Nationale. Ils avaient obéi à Pétain en
quittant le Liban et la Syrie pour revenir en France en 1941,
refusant de combattre avec la France Libre. La propagande de Vichy
était très active, bien faite ; en 1941 seulement cinq pour cent des
Français étaient contre Pétain. Le Maréchal était presque déifié,
c’était le vainqueur de Verdun ; il avait "fait don de sa personne à
la France." Mes oncles aussi avaient fait don de leur personne à la
France, mais pour de bon, ils ne sont pas revenus de
Forges-sur-Somme, ni de la boue de Notre-Dame-de-Lorette.
Les marins de Vichy se
sont retrouvés au sec, des demi-soldes sans bateaux après les avoir
sabordés au lieu de les amener à Alger.
Et pendant ce temps
Léon Moron "paradait" au Levant. Par décision du général Catroux, il
occupait de hautes fonctions dans la France Libre. De plus il
s’était moqué de la Marine en faisant croire, jusqu’au dernier
moment, qu’il rentrait en France avec son épouse, se renseignant sur
le volume de meubles qu’il pouvait emporter. Il devait jouer serré
car certains l’accusaient de fréquenter des gens de la « Dissidence,
» terme employé à Vichy pour désigner les Gaullistes.
Les pétainistes ne se
seraient pas gênés pour l’appréhender et l’embarquer en douce. Le
Tribunal Maritime Permanent de Toulon a instruit une enquête sur «
Moron L. H. accusé de désertion en temps de guerre et de haute
trahison, devant entraîner la peine : mort. »
https://www.histoire-genealogie.com/L-affaire-du-Sinaia-1939-1942
A Vichy les chacals
glapissaient, à Beyrouth, Moron s'en moquait.
Sur place, à Beyrouth,
de Gaulle intervient à plusieurs reprises pour "faire cesser les
manigances et les calomnies des Anglais contre Moron."
Les Anglais avaient de
nombreuses raisons de ne pas aimer Moron :
- Il connaissait
parfaitement toutes les côtes et les îles de la Méditerranée
orientale, ce dont ils étaient jaloux.
- Moron avait été nommé
par de Gaulle, via le général Catroux, Séquestre Général des biens
ennemis au Liban, fonction très importante pour Moron. En plus
d'énormes sommes en banque, tous les biens allemands, italiens, de
l'État de Vichy, de certaines personnes, étaient placés sous
séquestre. On ne pouvait y toucher sans l'accord de Moron. Imaginez
pour les pillards et les Anglais : un remorqueur, des bateaux, le
matériel de navigation, ancres, cordages, pièces de moteurs,
nourritures. L'armée de Vichy avait été obligée d’abandonner tout le
matériel de guerre. Un énorme butin qui faisait bien des envieux et
Moron n'avait que quelques secrétaires pour gérer et surveiller, pas
de policiers ni de soldats. S'il en prenait l’envie aux Anglais de
Beyrouth, ils pouvaient arriver en force et se servir. Moron
n'aurait pu s'y opposer, il lui fallait trouver une astuce.
Nomination Moron
Moron était bien placé
auprès du gouvernement libanais, du fait des importantes fonctions
qu'il exerçait depuis longtemps. Il connaissait du monde. Il fit une
vente fictive au gouvernement libanais de tout le matériel dont il
avait la garde. Sous sa discrète direction, il plaçait des
sentinelles libanaises de la police, faisait installer des grillages
et disposer des dizaines de panneaux portant la mention : "Propriété
du Gouvernement du Liban. Défense absolue d'entrer". Les Anglais
n'étaient pas contents, ils se doutaient bien que Moron les avaient
bernés, mais ils n'en avaient pas la preuve et n'osaient
transgresser les interdictions et provoquer des réactions
diplomatiques du tout jeune État. Ainsi, en se faisant beaucoup
d'ennemis, Moron a conservé un bien précieux pour la France Libre.
En plus des brigands et
des Anglais, il y avait aussi les commerçants libanais qui rêvaient
de faire leurs emplettes dans cette caverne d'Ali Baba. Tout était
bon en cette période où l'on manquait de tout ; il y aurait un gros
bénéfice à la revente. Dans l'heure de la nomination de Moron, tout
Beyrouth connaissait le nom du Séquestre, un vieil ami du Liban avec
qui on devrait pouvoir s'entendre …
Le lendemain, Moron
prend possession de son bureau. Dès l'ouverture des portes, un
Libanais entre et fait à Moron les grandes salutations réservées aux
personnages importants, lui assure la paix et le bonheur et se
réjouit d'avoir à traiter avec Monsieur le Séquestre Général
lui-même. Pendant que le commerçant s'adresse à Moron impassible,
ses domestiques envahissent le bureau, déroulent des tapis,
installent des fleurs, des fruits. Moron ne laisse rien paraître
devant la transformation de son bureau. "Geneviève s'amuserait bien
si elle voyait cela", pensait-il.
Quand tout est
installé, que le bureau a perdu son aspect austère, le commerçant
attend en souriant, les bras croisés, le moment d'entrer dans le
sujet. Mais Moron prend son air le plus sévère et s'écrie :
"Ce n'est pas le souk
ici, emportez-moi tout çà, déblayez, et vite."
Le lendemain, rebelote.
Le Commandant attend que tout soit bien installé, les salamalecs
prononcés, pour se lever et piquer sa colère en interdisant à son
visiteur de remettre les pieds chez lui.
Terminé ! Les deux
éclaireurs et leurs domestiques ont fait savoir à tout Beyrouth que
ce n'était pas la peine d'insister, Moron était incorruptible. Quel
dommage !
Je l’ai entendue plus
d'une fois cette histoire, le Commandant s'amusait à la raconter en
prenant des airs terribles.
GUSTAVE MEEROFF
Pour l'aider dans cette
tâche délicate, Moron trouva l'homme en qui il mit bien vite toute
sa confiance, avant de devenir son ami : Gustave Meeroff. Celui-ci
venait souvent au Souleilhal et je l'y ai rencontré plusieurs fois.
J’ai même dégusté à la cuiller (pas à la louche) le caviar qu'il
apportait dans un grand bocal. A cette époque il vendait du blé à la
Russie, ce qui l'obligeait à s'y rendre.
Dany, sa fille venait
souvent au Souleilhal, les Moron l'adoraient. A ma demande, elle a
fouillé sa maison et elle a trouvé des documents très intéressants,
comme le contrat d’embauche de son père.
L'histoire de Gustave
Meeroff et de sa famille est un roman. Le père de Gustave, Salomon
Meeroff est arrivé à Paris vers 1903 venant de Russie. Sioniste
convaincu il a rejoint Théodor Hertz, le père du sionisme. Salomon
Meeroff a milité activement toute sa vie pour sa cause. D'où son
départ de Paris en 1936 pour s'installer à Tel-Aviv avec son épouse.
En 1939, Salomon souffrant d'un cancer du poumon, sa femme fait
venir leurs trois enfants pour qu'ils revoient leur père. Les
enfants sont restés en Palestine et ont ainsi échappé aux nazis. A
la déclaration de guerre, Gustav a été mobilisé sur place et plus
tard il a rejoint la France Libre. C'est alors qu'il a rencontré les
Moron … et aussi sa femme. Dany est née au Liban en 1946.
En 1947, la famille
rentre en France et Gustave monte à Versailles une taillerie de
diamants qu'il fait venir d'Israël. Ils voyaient souvent les Moron
qui habitaient à Paris, rue Lamennais. Un soir, Meeroff oublia chez
eux son étui de diamants et ce fut une bonne histoire à raconter par
la suite.
GABRIEL BOUNOURE
Le 3 février 1942, le
capitaine de Frégate de réserve Jean Bucaille, 54 ans, témoigne à
charge contre Moron devant le juge d'instruction du Tribunal
Maritime de Toulon. Procès-verbal haineux puant la jalousie. Quand
le juge lui demande s'il connaît Bonhoure, voici sa réponse :
"Monsieur Bonhoure,
conseiller à l'instruction publique des états du Levant sous Mandat
Français était depuis de nombreuses années haut fonctionnaire du
Haut-Commissariat. Il faisait exprès de n'avoir que peu de relations
avec l'Armée et la Marine et il était connu comme esprit
universitaire (sic) et assez sectaire. Il était de plus intéressé et
pro-anglo-saxon. Le ménage Bonhoure avait des relations privées
suivies avec le ménage Moron ainsi qu'avec d'autres ménages vivant à
l'écart du milieu militaire et dont la plupart sont passés au
gaullisme."
Eh bien oui! Les Moron
préféraient la fréquentation de Gabriel Bounoure, de Jean Chauvel
ambassadeur de France, des Dessus, de Seyrig et d'André Gide à celle
de Bucaille.
" Gabriel Bounoure est
l'un de ces esprits extraordinairement déliés, l'une de ces
sensibilités à vif, faite de limpidité et de réserve obscure, à qui
beaucoup doivent leur approche fascinée du poème." C'est Salah
Stétié, poète, écrivain et ambassadeur du Liban qui parle ainsi de
son maître à l'École supérieure des lettres de Beyrouth.
Agrégé de Lettres, chargé de la poésie à la Nouvelle Revue
Française, Gabriel Bonhoure fut un découvreur de poètes et
d'écrivains. A l'arrivée des Moron au Liban il était Inspecteur
général des œuvres françaises et Conseiller pour l'instruction
publique dans les États sous mandat. Conseiller culturel auprès du
Haut-Commissariat français. Au Liban depuis 1923, il faisait le lien
entre les poésies orientales et françaises.
On pourrait citer bien
d'autres titres à son honneur, y compris sa conduite héroïque à la
guerre de 14-18.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Gabriel_Bounoure
Les Moron eurent au
Liban une vie culturelle et artistique féconde, œuvrant au
rayonnement culturel de la France au Moyen Orient. Geneviève fut à
l’origine d’importantes expositions conjointes entre Israël et le
Liban, ce qui serait inenvisageable aujourd’hui. La genèse et la
réalisation de ces expositions seront le sujet de mon prochain
article.
Remerciements Michel
Carcenac /
Page web
Remerciements complément / Jean Cordelle
Remerciements PDF / Jean Carriere
Remerciements lien web et complément PDF / Hélène Carcenac
Remerciements Stéphane Giran
Remerciements à Gilles Jogerst / Généamar pour ses recherches
et la mise à disposition de ses données
http://pages14-18.mesdiscussions.net/pages1418/Forum-Pages-d-Histoire-aviation-marine/marine-1914-1918/liste_sujet-1.htm
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et anciens élèves
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