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Officiers et anciens élèves -
Francis BENOIT
(19.. - 1943)
Né le - Décédé le 15 octobre 1943 à
l'émetteur de SAINTE ASSISE
Lien Mémorial AEN
Notes de M. Georges Paty (Période 1921-1955)
Dès le 2 novembre 1920 Il occupe la fonction de Directeur du Centre
d'Émission de Sainte-Assise.
Il le restera jusqu'à sa retraite en 1955, après la rétrocession de
Radio-France à l'administration des P.T.T.
Il décède le 15 novembre 1974 à Rennes, à l'âge de 87 ans.
…..
J'avais déjà pu placer chez mon ami Monsieur Ferrien, un jeune
réfractaire originaire de Rennes de 19 ans, Jean Chevet, étudiant,
afin de lui éviter le S.T.O (Service Travail Obligatoire), quand je
reçus la visite d'une haute personnalité de Seine-Port et de son
épouse, M. et Mme Charles Cuau qui venaient me demander de prendre
leurs petit-fils Francis Benoist, jeune enseigne de vaisseau de 2ème
classe qui venait de terminer ses études à l'École Navale, pour lui
éviter le même S.T.O
J'entrevis la possibilité de faire passer à l'extérieur, par le
truchement de ce jeune officier des "bandes de contrôle" des signaux
émis par Sainte-Assise, signaux enregistrés sur une table
spécialement équipée de la passerelle de contrôle des machines. Je
comptais que les radios allemands se tenaient souvent en dehors de
cette passerelle, et que les rouleaux de bande enregistreuse
seraient assez faciles à dissimuler. Mais mon attente fut déçue sur
ce point.
J'acceptai la demande qui m'était faite, et le jeune Benoist fut
considéré comme un stagiaire non appointé. J'aurais dû demander
l'accord téléphonique du Colonel Garnier, toujours soufrant à son
domicile, ou tout au moins lui rendre compte. Mais comme je ne
pouvais exposer mes raisons au téléphone je m'en abstins, remettant
à un prochain déplacement au siège social d'informer M. Robert
Tabouis. Néanmoins les deux chefs de station Grenier et Mossmann
furent mis au courant et priés de camoufler le plus possible le
jeune Benoist au cas où des officiers de la Kriegsmarine viendraient
dans les stations pour quelque cause que ce soit.
C'est alors que Francis Benoist se trouvait à l'ancienne station
continentale, non occupée par les radios de la Kriegsmarine, et où
M. Marting, ingénieur de la CSF procédait à des essais sur deux
émetteurs équipés pour la radiotéléphonie avec une partie du
personnel de Radio-France qu'un terrible accident survint le 16
octobre 1943, juste au moment où un officier de santé allemand
accompagné de l'obertfunkmeister entrait dans la salle pour une
visite de simple curiosité.
M. Benoist se dirigea, sans aucune hâte, sur l'arrière des panneaux
d'émetteur, en enjambant une chaîne de sécurité munie de sa pancarte
"Danger de Mort", barrant l'accès des caissons. Malheureusement, en
exécutant ce mouvement qui l'aurait dissimulé aux visiteurs
indésirables, il glissa sur une tôle striée d'un caniveau, et pour
reprendre l'équilibre, étendit instinctivement le bras, ce qui amena
le majeur de la main gauche au contact d'une borne d'un condensateur
de filtre H.F.
Le pauvre garçon tomba, foudroyé, et malgré les secours immédiats,
la mise en train du respirateur Panis avec masque oxygène carbogène,
les piqûres intraveineuses d'huile camphrée, le réchauffement des
pieds… ainsi que la marche incessante de l'appareil Panis de 16h30 à
2 heures le lendemain matin, nous ne pûmes le rappeler à la vie.
Dès que la respiration artificielle fut pratiquée, moins de dix
minutes après l'électrocution, je fis quérir son père, docteur à
Corbeil, le docteur Limoge, médecin de la compagnie n'ayant pu être
contacté à temps, et avec Grenier nous ne les quittâmes pas tant que
nous pûmes garder espoir. M. Marting partit cependant dîner peu
avant l'arrivée du docteur Limoge qui fit une injection
intraveineuse de "cycliton Roche" vers 21 heures.
Il se produisit alors un phénomène qui nous redonna courage, car sur
les mains étendues, si pâles, nous vîmes les veines se gonfler comme
sous un afflux sanguin. Le cœur se remettait donc à battre ? Hélas,
ce ne fut que passager.
Le cœur brisé, affreusement peiné devant la douleur de ce père
effondré, nous transportâmes à 3 heures la dépouille mortelle de
Francis Benoist, à Croix-Fontaine, chez ses grands-parents, et je
rentrai chez moi sachant bien que le sommeil ne pourrait venir.
Depuis, je pense toujours aux environs du 16 octobre, chaque année,
à ce drame imprévu et à la parfaite attitude de mon chef, lorsque je
dus aller à Brunoy lui rendre compte en détail de l'initiative que
j'avais cru pouvoir prendre pour combattre l'Allemand et des
conséquences malheureuses de ma décision pour cette famille et pour
Radio-France.
Après un silence, le Colonel Garnier ne me fit nul reproche et me
donna ses instructions pour revoir les parents, et pour les obsèques
auxquelles une délégation du personnel assista à Paris et au
cimetière Montparnasse.
Le nom de Francis Benoist figure sur le Monument aux Morts de la
Guerre sur la place de la Mairie de Seine-Port.
Remerciements Denis Hannotin
Remerciements Jean-François Graziani
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